Brutalisme, quand le béton pansait les plaies de l’Histoire

@lephotographelyonnais

Un nom comme une équivoque, le brutalisme est une passerelle entre deux époques : celle de la guerre et de sa brutalité ; celle du futur et de son béton armé. Né des efforts de reconstruction d’après-guerre dans les années 1950, le mouvement brutaliste sera particulièrement « populaire » jusque dans les années 1970. Souvent critiquées, parfois appréciées, – entre oriflammes d’avant-garde et épures d’une société lasse de conflits -, voici des édifices que l’on adore détester !

Dans les années 1950, des capitales européennes comme Londres ou Paris, défigurées par la guerre doivent entreprendre leur reconstruction. Pragmatisme oblige, les villes cherchent des bâtiments utilitaires, rapides à construire et de conception pratique. Le brutalisme, avec ses formes géométriques massives, ses angles droits et sa simplicité, apparaît alors comme la solution idoine.

Bibliothèque nationale d’Argentine, Clorindo Testa / @wikipedia

Faire table rase du passé

L’idée des brutalistes est de faire disparaître des villes le souvenir de bâtiments éventrés, d’édifices martyrisés ou de rues saccagées. La nostalgie ne tient aucune place dans la logique du mouvement. Cette approche originale se matérialise alors dans un matériaux hautement symbolique : le béton brut. Plus qu’une option économique intéressante, le béton représente alors l’avenir. Un avenir que l’on veut solide et vecteur de cohésion entre les Hommes.

Précurseur du mouvement, Le Corbusier signe avec sa Cité radieuse (Marseille, 1952) un chef-d’oeuvre brutaliste. Unité d’habitation rectiligne, en béton brut de décoffrage, la Cité a été conçue dans le but de favoriser le lien social. Il s’appuie pour cela sur un enchevêtrement de corridors, de « rues intérieures » et de lieux de vie et de sociabilité (hôtel, restaurants, commerces, crèche). Le site est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2016.

La Cité radieuse « fait l’effet d’un énorme bateau de l’humanité, voguant à travers la banlieue verdoyante de Marseille avec un village entier à bord« , poétisent les historiens de l’art Marvin Trachtenberg et Isabelle Hyman.

Cité radieuse, Le Corbusier (Marseille, 1952) / @DR

Pourtant, en dépit de ses nobles desseins, le brutalisme ne séduit pas tout le monde. Loin de là ! La colère gronde et public comme critiques se plaisent à agonir le style balourd de ces bâtiments. Par exemple, l’architecture brutaliste de la faculté d’art et d’architecture de l’université de Yale (Etats-Unis), était particulièrement controversée. Incendiée en 1969, la rumeur disait que la critique était la cause du drame. Quant à lui, l’Hôtel de ville de Boston a été élu « bâtiment le plus laid au monde » par un sondage des lecteurs du site VirtualTourist.com.

Yale, Paul Rudolph (New Haven, Etats-Unis, 1963) / @Sage Ross
Hôtel de ville de Boston / @DR

Mal aimé oui ! Mais le brutalisme peut tout de même s’enorgueillir de quelques réalisations particulièrement réussies. C’est notamment le cas de la Sesc Pompeia de l’architecte Lina Bo Bardi à Sao Paulo (Brésil, 1982). Edifié sur les ruines d’une ancienne usine désaffectée des années 1930, le bâtiment se compose d’un centre communautaire, d’une école, d’une bibliothèque, d’un théâtre, d’un espace d’exposition et de restaurants. L’architecte s’est appuyée sur les bâtiments d’origines en brique et leur réseau de rues et a percé certains murs afin de créer des espaces ouverts. Lina Bo Bardi a également érigé trois nouvelles tours en béton reliées entre elles par une multitude de ponts. Tout en évoquant le passé industriel du site, Sesc Pompeia a considérablement redynamisé le quartier où il s’est implanté.

Sesc Pompeia, Lina Bo Bardi, Sao Paulo (Brésil) / @DR
Sesc Pompeia, Lina Bo Bardi, Sao Paulo (Brésil) / @mai.art

Enfin, avec ses formes sèches et austères, le brutalisme a naturellement séduit le bloc de l’Est durant la guerre froide. Les architectes socialistes essaimaient alors de grands blocs monolithiques censés exalter la puissance du communisme et stimuler la productivité collective. Un exemple retient notre attention : celui de la maison des Soviets de Kaliningrad (Russie). Edifié sur un ancien château prussien, le maison symbolisait l’ordre nouveau. Comme un pied de nez à l’histoire, elle ne sera jamais terminée.

Maison des Soviets, Kaliningrad (Russie, 1960) / @Legion Media
L’Oeuf, Harrison & Abramovitz, (New York, 1978) / @DR

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