Chiner, transformer, mettre en scène : l’art de vivre selon Marie

Au commencement était une bonnetière. Ce meuble qui traverse les époques et résiste au temps peut aussi susciter des vocations. En 2009, après une première vie dans la mode, Marie se lance dans la rénovation de meubles. Elle ne se doute peut-être pas qu’elle en fera son métier. Cette « bonnetière originelle » qu’elle rénove pour la première fois sera pourtant le début d’une aventure qui la mènera à se (re)découvrir. Aujourd’hui c’est une femme épanouie, en « paix avec elle-même » comme elle nous le confie, qui exerce son métier avec passion. Pour nous, elle nous ouvre les portes de son quotidien de brocanteuse.

De La Cour Au Jardin : Qu’est-ce qu’Écrin d’Antan ?

Marie, Ecrin d’Antan :  Écrin d’Antan a été créé il y a six ans. À l’origine, ça devait être un moyen pour moi d’exposer toutes mes créations et mes rénovations. Tout a démarré avec ma casquette d’artisan, de rénovatrice. Puis, la partie brocante pure est rapidement venue se greffer et a très vite évoluée en « café-brocante ». En définitive j’ai une activité double, voire triple ou quadruple qui englobe plusieurs métiers !

Pouvez-vous nous décrire votre métier et ses multiples facettes ? 

Marie, Ecrin d’Antan : Je suis devenue artisan à temps plein en 2014. Au départ, je ne faisais que rénover des armoires. J’étais spécialisée dans la bonnetière qui est un petit meuble que j’adore et que je peux placer partout dans une maison. J’étais dans un atelier partagé avec d’autres artisans en rive droite de Bordeaux. Il y avait des métalliers, des soudeurs, des artistes peintres… À leur contact j’ai appris la richesse de la pluridisciplinarité. J’ai été initiée à d’autres choses, d’autres univers. En les voyant créer, rénover, ça a commencé à m’inspirer.

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Avez-vous toujours eu la fibre bricoleuse ?

Marie, Ecrin d’Antan : Pas du tout ! Il faut savoir qu’avant 2009, je ne savais pas utiliser un tournevis ou un marteau. Je n’étais pas bricoleuse du tout, donc je reviens de loin. (rires) Comme quoi, tout est possible avec un peu de volonté et surtout un travail sur soi. Avant 2009, j’avais une activité purement commerciale et j’ai voulu faire un break. J’ai fait un gros travail sur moi et c’est là que m’est venue cette passion ou plutôt cette vocation pour le travail manuel.

Chez De La Cour Au Jardin on s’attache aux parcours de vie et à ces chemins que l’on emprunte un peu malgré soi, au gré des rencontres et des envies. Qu’est-ce qui a déclenché ce changement de vie et cette passion pour les bonnetières ?

Marie : En 2009, j’ai eu un brusque arrêt dans mon parcours professionnel. Me « frotter » à la rénovation d’une bonnetière, ça a été pour moi une manière de faire le vide. Beaucoup d’émotions enfouies sont ressorties. J’ai poncé, j’ai rénové et à mesure que je travaillais sur ce meuble, j’ai senti naître en moi cette envie d’être entourée de choses et de matières brutes et naturelles. Comme je le dis toujours, « l’extérieur est le reflet de ce qu’il y a à l’intérieur ». Beaucoup de personnes pensent qu’en modifiant leur extérieur, leur apparence, ils vont opérer un changement. Pour moi, c’est l’inverse. C’est quand on a vraiment fait un travail sur soi que tout prend sens et rejaillit naturellement à l’extérieur. J’ai donc fait un énorme travail sur moi et à partir du moment où j’ai été moi, sans contrainte, que j’ai été libre, que je me suis sentie exister, c’est là que j’ai vraiment voulu m’entourer de choses authentiques et naturelles, pures et imparfaites. Les meubles sont imparfaits, ils sont bourrés d’imperfections et de vécu. Et c’est ça que j’aime chez eux. Comme nous ils portent les traces d’une vie. Être entourée de tous ces objets qui ont une âme, une histoire, c’était pour moi une évidence. 

Ces objets qui racontent une histoire, comment vous les chinez ? Vous avez une idée précise de ce que vous recherchez ou vous vous laissez séduire par des « rencontres » ? 

Marie : Quand je pars chiner, je ne pars jamais avec une liste d’objets que je cherche, ou très rarement. En général, je pars chiner l’esprit ouvert. Je me laisse inspirer par ce que je découvre. 

Vous créez des mises en scène des objets que vous chinez ici et là. D’où tirez-vous votre inspiration pour ces compositions ? 

Marie : Quand je vois un objet, j’ai déjà une idée précise de la mise en scène que je vais faire autour de lui. Certes, l’objectif c’est de le vendre mais il m’arrive de le « cacher » des clients un petit moment pour avoir le temps de lui confectionner un décor. Comme je travaille beaucoup sur les thématiques naturelles, sur la saisonnalité, je m’inspire de la nature, des arbres, des fleurs qui sont autour de nous. Et donc je crée mes décors en fonction de mon intuition et de mon humeur du jour. Je n’ai pas forcément d’idée établie, les choses naissent d’elles-mêmes. C’est ma part d’intuition ! Parfois, quand je bloque sur quelque chose, il suffit que je fasse un peu d’introspection pour qu’un objet m’apparaisse spontanément.  Un exemple concret : j’ai référencé une marque de bougies récemment et je voulais absolument que les gens puissent les sentir. Je me disais qu’il me faudrait des petites cloches pour que l’odeur reste bien enfermée dedans et que ça puisse servir d’échantillon aux clients. Mais je ne peux me résoudre à acheter quelque chose de neuf alors je suis partie faire un vide grenier avec cette idée de cloche en tête. Et, posées sur un étalage, j’ai trouvé ces petites ventouses décorées et gravées dont le propriétaire ne savait même pas à quoi elles pouvaient bien servir. J’avais trouvé mes cloches. C’est un peu la magie qui opère pour moi ! 

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Aujourd’hui, la tendance est au réemploi, à la seconde vie… Est-ce que cette manière plus responsable de « consommer » fait partie intégrante de votre démarche de brocanteuse ?

Marie : Complètement ! Que ce soit en décoration, en prêt-à-porter ou autre, c’est très rare que je me rende dans un magasin pour acheter des produits neufs. Je privilégie toujours la solution de réemploi. Je ne suis pas contre le neuf, mais, notamment pour le linge et le prêt-à-porter, je n’achète pas ou peu dans les enseignes qui renouvellent leur collection chaque saison voire chaque mois ou même semaine. J’attache de l’importance à l’origine de fabrication et je connais quelques bonnes adresses de déstockage. Pour y avoir travaillé, je connais trop bien l’univers de la mode et du luxe et je m’en suis totalement détachée ! 

Vous semblez très attachée à l’authenticité…

Marie : Ah oui, authenticité et naturel ! Tout ce qu’il y a autour de moi dans mon habitation comme dans ma boutique est authentique. C’est aussi important pour moi de montrer aux gens que tout est possible et que l’on peut créer, transformer, redonner vie à toutes les matières. 

Vous vous considérez comme une brocanteuse ? 

Marie : Je suis officiellement brocanteuse. Je travaille très souvent avec d’autres brocanteurs qui officient notamment place Saint-Michel à Bordeaux ou qui possèdent leur propre magasin. Cela dit, je ne fais pas le même métier qu’eux. À la différence du brocanteur « classique » qui achète pour revendre, moi j’achète pour transformer. Je vais nettoyer les objets, les reconditionner, les mettre en scène… en fait mon métier est multiple !

A quoi ressemble votre journée type ? Comment vous organisez-vous ? Où vous approvisionnez-vous ?

Marie : Je chine très tôt le matin parce que c’est là que se font les bonnes affaires. Alors je me lève en général vers 3h-4h du matin et je peux également me déplacer assez loin pour trouver des objets qui m’intéressent. Je rayonne dans un périmètre de 300 à 400 km autour de Bordeaux et mes sources d’approvisionnement sont multiples : recycleries, vide-greniers, brocantes… Je travaille aussi beaucoup avec des hommes et des femmes qui débarrassent des maisons et qui m’ouvrent les portes de leurs entrepôts. C’est assez intéressant pour moi qui chine souvent du volume. Je ne me déplace pas pour un seul objet. Quand je me déplace, c’est pour remplir une voiture et une remorque entière. 

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Ça doit faire du stock…

Marie : Ah oui ! Du stock j’en ai tout le temps. J’ai des arrivages toutes les semaines en grosses quantités et ces objets nécessitent de la manutention. Dans mon métier, je dois toujours rentrer des nouveautés et remettre en état les objets qui arrivent. Donc, je passe beaucoup de temps dans mon atelier. Au minimum deux à trois jours par semaine. Puis j’ouvre ma boutique l’après-midi. Donc ça fait de grosses journées ! C’est un beau métier, multitâches, mais il faut lui consacrer beaucoup de temps, d’énergie et de passion pour que ça marche.

Vous courez la France à la recherche d’objets qui vous animent, avez-vous un « objet-Graal » que vous cherchez désespérément ?

Marie : Non parce que je ne cherche rien ! (rires) Je ne suis pas matérialiste, je ne m’attache absolument pas aux objets. Bien sûr j’ai des objets fétiches qui attirent mon attention, les cages à oiseaux par exemple. Je peux aussi être en recherche de certains objets sans parvenir à les trouver pendant un certain temps et de tomber « miraculeusement » dessus. Hier encore ça m’est arrivé. Cela devait faire six mois que je cherchais en vain des vases Médicis et j’en ai trouvé sept d’un coup. Il y a parfois des choses qui ne s’expliquent pas.

Avez-vous des commandes particulières de vos clients ? Vous mettez-vous « en chasse » d’objets pour des particuliers ?

Marie : Tout à fait. J’ai toujours un carnet rempli de demandes de clients mais il m’arrive également souvent d’avoir des intuitions. Je connais très bien mes clients, leurs maisons et leurs goûts et parfois il y a des évidences quand je découvre un objet. Dans ces cas-là j’envoie une photo à mes clients et je leur propose ma découverte en avant-première. 

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Est-ce que vous intervenez directement sur la décoration intérieure de particuliers ou de professionnels ? Les conseiller sur la décoration mais aussi leur trouver les objets et les meubles qui correspondraient…

Marie : Ça m’arrive oui. J’ai dernièrement travaillé avec une décoratrice qui m’a confié la décoration intérieure d’un loft parisien. Il m’arrive régulièrement de travailler pour des décorateurs pour des mises en scène photos. Je collabore également avec des particuliers ou des professionnels sur des chambres d’hôtes, des gîtes ou simplement des rénovations d’espaces de vie.

Notez-vous des tendances fortes en matière d’objets ? Des comportements ou des habitudes des consommateurs ?

Marie : Je suis présente sur les réseaux parce que les clients se déplacent de moins en moins en magasin. Ils « chinent » et s’inspirent en ligne. Je trouve cela un petit peu dommage parce que la plupart du temps ils s’inspirent pour reproduire à l’identique. Très souvent on vient en magasin et on me montre toujours les mêmes photos. J’ai l’impression que tout le monde veut la même chose. A contrario, mon travail n’est pas de copier mais de créer. 

Vous vous désolez de cette standardisation des goûts…

Marie : Oui. J’ai l’impression que tous les intérieurs tendent à se ressembler. On cherche un intérieur « à la mode » ou « tendance » mais ça manque souvent de personnalité. Et puis ça manque aussi de couleurs ! Je vois beaucoup d’intérieurs en bois aux tons beiges, crèmes, blancs… et il n’y a plus de couleurs. Je me demande comment les gens arrivent à vivre dans ces univers décolorés. 

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C’est quoi l’art de vivre pour vous ?

Marie : Pour moi c’est vivre en harmonie avec la nature et surtout être en rapport avec soi. Tout mon art de vivre tourne autour de la simplicité et de l’authenticité. C’est ce qui a le plus de charme selon moi.

Si De La Cour Au Jardin était un objet de brocante, lequel serait-il ?

Marie : Une porte ! Une porte en bois, ancienne. La porte c’est un symbole de liberté. Elle raconte une histoire, c’est un point de passage, une ouverture. Elle sépare différents univers. 

Propos recueillis par Alexandre Molitor


Écrin d’Antan

Café-Brocante

6 Le Bourg, 33420 Grézillac

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