Handicap : De La Cour Au Jardin engagé pour l’habitat adapté avec la Fondation Garches

À l’initiative de sa présidente, Isabelle Larochette, De La Cour Au Jardin est engagé depuis 2019 sur la question du handicap avec la Fondation Garches. À travers une formation dédiée, exclusive en France, les consultants du réseau DLCAJ peuvent ainsi appréhender les spécificités de l’habitat adapté et les complexités qui en découlent. Une manière de combler le trou béant d’une offre immobilière quasi exclusivement réservée aux valides, de sensibiliser et d’apporter le conseil et l’expertise de professionnels à des personnes invalidées. Entretien croisé avec Sandra Pottier, directrice de la Fondation Garches et Isabelle Larochette, présidente de DLCAJ.

Le Magazine : Chez De La Cour Au Jardin, nous allons à la rencontre de personnes qui ont des métiers ou des engagements particuliers. Et, en ce début d’année, nous souhaitions donner la parole à un partenaire qui nous est cher, à vous Sandra Pottier, directrice de la Fondation Garches. Pour commencer, comment présenter la Fondation ? Quelles sont ses missions ? 

Sandra Pottier, directrice de la Fondation Garches : La Fondation Garches c’est d’abord une fondation reconnue d’utilité publique par le ministère de la Recherche et de l’Enseignement dans le domaine de la recherche. Le but de cette fondation qui, à l’origine, était une association créée par des médecins, est vraiment de se positionner sur des besoins non pourvus par l’hôpital pour les patients en situation de handicap. Comme nous sommes installés au sein de l’hôpital de Garches, nous sommes vraiment à proximité des personnes et des patients en situation de handicap moteur. recherche. L’intérêt de cette fondation, c’est d’abord d’identifier des besoins qui ne sont pas pourvus et, éventuellement, innover en matière de technologie dédiée au handicap. Bien entendu cela passe par des travaux de recherche mais aussi par des formations.

Vous travaillez conjointement avec les professionnels de santé ? 

Sandra Pottier, directrice de la Fondation Garches : Nous diffusons de l’information pour permettre aux médecins et aux paramédicaux de l’hôpital de continuer à évoluer et avoir des compétences supplémentaires. On organise par exemple un colloque scientifique tous les ans. On organise également des formations quasiment mensuelles au Centre d’Essais des Fauteuils Roulants (https://www.handicap.org/?page_id=184) pour que tout le monde soit au courant des dernières techniques qui sortent.

Session de formation – Habitat adapté – De La Cour Au Jardin

Vous avez également une mission plus large de sensibilisation. Dans le cadre de notre partenariat, nous avons co-construit un « module de formation » à destination des consultants immobiliers de De La Cour Au Jardin. 

Sandra Pottier : En effet, nous dispensons des formations pour les « extérieurs », c’est-à-dire des gens qui n’ont rien à voir avec le domaine du handicap au démarrage, mais qui ont le souhait de prendre en charge des patients en situation de handicap. Avec De La Cour Au Jardin, l’objectif était de proposer des formations qui soient adaptées et qui répondent à un besoin lié au métier d’agent immobilier. 

Isabelle Larochette, Présidente De La Cour Au Jardin : Initialement, lorsque j’ai créé le réseau de mandataires DLCAJ, j’ai rencontré une personne qui nous a rejoint et qui était handicapée suite à un accident de voiture. Je lui ai fait part de mon envie de faire en sorte que ces « biens de charmes », ces biens authentiques, on puisse aussi les destiner à des personnes à mobilité réduite. Je suis très fière d’avoir noué ce partenariat avec Sandra (Pottier). On note un vrai engouement de nos consultants et des personnes qui nous rejoignent pour cette question de l’habitat adapté. L’enjeu n’est pas commercial. C’est d’abord une question de solidarité. Et si on peut aider une personne à trouver le logement qui lui ressemble grâce à cette formation spécifique… bah c’est gagné !

Parmi les missions de la Fondation Garches, vous évoquez le fait d’apporter une réponse à des besoins non pourvus. Vous pouvez nous donner des exemples ? Quels sont ces besoins auxquels ne répond pas l’hôpital ? 

Sandra Pottier : Pour vous donner un exemple, à Garches, nous avons énormément d’accidentés de la routeIl y a beaucoup, beaucoup de gens qui malheureusement terminent en fauteuil roulant. Or, à l’époque, il n’y avait pas de consultation pour le conseil et l’aide au choix du fauteuil roulant. À ce moment-là, on s’est dit qu’il fallait vraiment que l’on crée un centre du fauteuil roulant. Un centre qui aiderait au choix du fauteuil. Que l’on soit jeune ou âgé, sportif ou pas, on ne va pas avoir le même fauteuil. Notre objectif était vraiment d’apporter un conseil adapté à la personne et à son type de handicap. De cette première action en a découlé une action sur le positionnement. Parce que ce n’est pas le tout d’avoir un beau fauteuil. Encore faut-il y être bien installé. 
Autre exemple, nous répondons aujourd’hui à une urgence : celle des aidants. Certains d’entre eux sont dans une grande souffrance psychologique. Pour les aidants, le handicap est une situation très lourde au quotidien. Il n’y a pas de prise en charge psychologique pour ces gens-là. En fin de compte, l’idée c’est de se dire que si un patient a une écoute à la maison et si la personne qui l’encadre au quotidien ou qui vient à l’aider est en forme, alors ça se passera mieux pour son retour à domicile. Donc, l’idée, c’est vraiment d’apporter un soutien psychologique à ces aidants qui sont souvent en perte de repères et qui ne savent pas qui se confier. Pour eux c’est « normal » de s’occuper de quelqu’un. Ils n’ont « pas le droit » de se plaindre. Nous avons alors pris le sujet à bras le corps. Nous récoltons des fonds et nous avons une psychologue à mi-temps depuis trois ans maintenant pour soulager les aidants. 

Vous êtes vraiment au cœur de la question du handicap. Un sujet toujours sensible. Un sujet qu’on préfère ne pas aborder. Parce que c’est plus facile de ne pas voir. De ne pas prendre en compte la différence de l’autre. Quel regard vous portez-vous sur le handicap aujourd’hui ? Est ce qu’il y a encore un hiatus énorme entre ceux qui vivent le handicap et ceux qui ne le vivent pas ?

Sandra Pottier : Je pense qu’il y a vraiment un fossé et j’en suis le premier exemple. Je suis arrivé à Garches il y a 11 ans maintenant. – Je tiens à préciser qu’à Garches, nous travaillons exclusivement sur le handicap moteur. Il y a des troubles crâniens avec quelques troubles cognitifs, mais dans l’ensemble, on n’a pas de handicap invisible ou de handicap visuel. –  Tout le monde me dit : « c’est horrible », « ça doit être terrible … », etc. Eh bien en fait, non,  pour moi, pas du tout. Pas parce que que je suis mieux qu’un autre, mais parce que quand on rentre dans l’Hôpital, on sait très bien qu’on va croiser des gens dans une situation impossible. Alors certes, des fois, quand on voit des gens très déformés, ça peut, ça peut surprendre. Mais ce que l’on n’a pas du tout à l’esprit, c’est comment les gens perçoivent notre regard et comment ils perçoivent leur vie. Au contact de ces personnes, à force d’écouter les uns et les autres, j’ai énormément évolué.  

Un exemple à nous partager ?

Sandra Pottier : J’ai débuté en réanimation et en pédiatrie. Pas forcément les secteurs les plus « sympas », pas les plus faciles. Un jour, je suis arrivé avec un exosquelette que je souhaitais tester. Je vois une jeune que je connaissais bien et qui avait un handicap très lourd. Une jeune femme très sympa, très dynamique qui voyageait beaucoup malgré son jeune âge.  Je lui dis : « je te file des jambes et je récupère ton fauteuil ». Et elle me répond : « Mais ça va pas la tête ? Qu’est-ce que je vais faire avec des jambes. J’en veux pas. J’ai toujours vécu sans jambes. ». En fait, la première étape elle est simple. C’est de discuter avec les gens. Il ne faut pas s’en passer. Ils n’attendent que ça. Quand on arrive à parler librement c’est qu’on a franchi cette barrière et cet obstacle. Donc ça, c’est vraiment ma première leçon. 

Avec notre regard de valide, on met parfois sur la question du handicap un voile de pudeur qui n’a peut-être pas lieu d’être…

Sandra Pottier : Oui, c’est exactement ça. Après bien sûr, il faut modérer ce propos. Dans le cas de cette jeune fille que j’évoque, elle avait un handicap acquis. Elle est née comme ça. Bien évidemment, quand on s’adresse à un accidenté de la route, qui perd ses jambes à 20 ans ça ne se passe pas de la même manière. C’est un travail de deuil d’une partie du corps, de deuil d’une vie dans un état, de reconstruction psychologique… Le positionnement n’est pas le même. 

Qu’est-ce qui reste à faire pour inclure les personnes touchées par le handicap ? 

Sandra Pottier : J’ai le sentiment qu’on n’a pas beaucoup évolué. Je me souviens d’une patiente qui avait été amputée d’un bras suite à un accident de voiture. Elle était heureuse de partir en vacances aux États-Unis parce que personne ne la regardait comme une bête curieuse là-bas. Il y a encore beaucoup à faire et je pense que ça devrait commencer à l’école. Sans tenir compte du discours politique actuel, je pense que c’est nos petits que l’on doit éduquer. Spontanément, les enfants essaient de bidouiller le fauteuil parce qu’ils trouvent ça « rigolo » ! Et ce sont les parents qui les retiennent. Par pudeur. Par gêne. Mais ce qui est sûr, c’est que les gamins, eux, ils y vont. Ils intègrent le fauteuil sans jugement. On intègre bien des langues étrangères non ? Je pense que c’est la même chose.

Quand on regarde notre environnement quotidien, on s’imagine – où plutôt on ne s’imagine pas – la difficulté de ce que peut être la mobilité en fauteuil dans nos villes. Mais, être handicapé, ce n’est pas seulement se mouvoir, c’est également habiter quelque part. Et là aussi, les personnes à mobilité réduite rencontrent des difficultés. Ce n’est pas facile de trouver un logement adapté qui ne ressemble pas à une chambre d’hôpital. Chacun a le droit d’avoir un logement à son goût.

Sandra Pottier : Le handicap, ce n’est pas moche. Ce n’est pas parce qu’on est handicapé qu’on a le droit qu’à du gris, du mauve, du terne. On est tous pareils. On n’a pas envie d’un appartement qui ressemble à une chambre d’hôpital. Pas du tout. On veut tous un logement qui nous ressemble.

Isabelle Larochette : Il faut changer de regard. Notre travail à nous c’est d’accompagner nos clients dans leurs projets de vie. Le handicap ne doit pas définir une personne. Notre objectif en formant nos consultants à l’habitat adapté c’est avant tout de leur permettre d’accompagner au mieux nos clients touchés par le handicap. Pour cela, il faut comprendre les spécificités, les règles, les normes d’un logement adapté mais ça ne doit pas s’arrêter là. Nous avons toutes et tous le droit à un logement à notre goût alors nous souhaitons leur proposer autre chose qu’un appartement stéréotypé, tout blanc, aseptisé. Le « charme » ne doit pas s’arrêter au fauteuil. L’idée c’est justement de leur trouver des lieux où ils vont se sentir chez eux. Et puis, notre engagement avec la Fondation Garches nous permet aussi de sensibiliser nos clients dits « valides » à ces questions du handicap. C’est un enjeu de société fort auquel nous souhaitions prendre part.

C’est justement parce qu’on a constaté cette absence d’offre de biens authentiques pour les personnes à mobilité réduite, qu’on est venu vous rencontrer. En quoi consiste la formation que vous avez créée sur-mesure pour De La Cour Au Jardin ?

Sandra Pottier : Cette formation, s’articule autour de trois axes. Le premier, qui est très important, c’est de donner une boîte à outils à l’agent immobilier. Ce n’est pas parce qu’on est dans un logement neuf que tout est adapté au handicap. On a voulu aider l’agent à se mettre à la place de la personne en fauteuil. Comment est-ce qu’on peut repenser un intérieur lors d’une visite ? Comment voir ce qui est faisable et ce qui restera totalement inaccessible ? Sur cette partie de la formation, les agents travaillent avec une ergothérapeute qui les forme aux spécificités de l’aménagement adapté mais également aux différentes pathologies du handicap. Elle leur donne des clés. 

Le deuxième axe de la formation est assuré par une assistante sociale pour présenter les différentes aides auxquelles les personnes handicapées peuvent prétendre, dans quel cadre et comment en bénéficier. Et le troisième axe porte sur l’approche psychologique. On souhaitait que l’agent immobilier ne se sentent pas gêné. On évoque avec eux la façon d’aborder les choses, de lever certains tabous.

Les consultants qui suivent la formation sont aussi « immergés » dans le handicap… 

Sandra Pottier : Ça j’y tiens beaucoup, c’est le passage obligé par le fauteuil. Ils se rendent compte que c’est très, très galère. Et puis, pour couronner le tout, l’hôpital de Garches est quand même très mal foutu. Même moi, valide, j’ai du mal à ouvrir certaines portes. Donc, imaginez les personnes qui arrivent en fauteuil roulant… Ils n’ont pas tous fait de la gonflette. Ils ne sont pas tous bodybuildés. C’est juste ingérable. 

Isabelle, après avoir suivi la formation, quelle est votre approche ?

Isabelle Larochette : Eh bien, elle reste la même que pour une personne « valide » ! On cherche à connaître la personne que l’on a en face de nous. Ses goûts, ses aspirations, ses projets. Lorsque l’on rencontre une personne handicapée, on cherche toujours à comprendre comment elle en est arrivée jusqu’ici. Comme avec n’importe quel client, on évoque son parcours et puis il y a forcément cette question de la démarche psychologique. Comment elle a accepté son handicap, comment elle le vit au quotidien et pourquoi elle a souhaité nous rencontrer. On se concentre sur la relation que l’on tisse ensemble. Derrière, nous pouvons compter sur notre expertise du monde de l’immobilier et sur les connaissances juridiques et réglementaires idoines pour l’accompagner au mieux dans sa recherche.

La Fondation Garches est régulièrement sollicitée par des agences immobilières. Vous avez toujours décliné. Pourquoi avoir fait confiance à De La Cour Au Jardin ? 

Sandra Pottier : Je ne vous cache pas que quand Isabelle [Isabelle Larochette, Présidente de DLCAJ, ndlr] m’a appelé au départ, j’étais d’abord surprise, intriguée et un petit peu réticente. J’avais ce cliché de l’agent immobilier et je me suis dit « ce sont des commerciaux, ce n’est pas pour moi ». J’avais la crainte de voir mon engagement galvaudé et mal utilisé. On a eu plusieurs échanges avant que je réalise que j’avais quelqu’un d’assez sérieux en face de moi. Et, la confiance aidant, nous avons lancé ce programme de formation. Pour moi, l’idée n’est pas de former tous les agents immobiliers. Il faut que cela vienne d’eux. Il faut qu’ils aient envie de le faire. Je ne veux pas que des gros groupes viennent frapper à notre porte pour des raisons commerciales, pour des raisons d’image, de marketing. Ça, je n’en veux pas. Il n’y en aura pas. 

Quel est le message que vous souhaitez porter avec la Fondation Garches ?

Sandra Pottier : Garder l’esprit ouvert ! Ne pas se focaliser sur les différences. Finalement, c’est être beaucoup plus inclusif. Ce n’est pas une vue de l’esprit. Il faut penser de façon beaucoup plus globale. Il faut penser la mobilité, l’accès au travail… Pourquoi est-ce qu’on est sans arrêt obligé d’adapter des choses aux personnes en situation de handicap ? Si on pensait plus globalement à l’ensemble des cas et des situations qui nous sont proposées, ce sera beaucoup plus simple en fait.  Plutôt que de réaménager un abribus, pourquoi est-ce que l’on ne prendrait pas en compte toutes les situations différentes dès le départ. 

Témoignage d’un consultant formé

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