« Laissez le temps au temps », l’adage de Simon le jardinier

À mesure que le printemps s’épanouit, la nature s’émancipe des frimas de l’hiver. Ne courbant plus l’échine, elle se lance, légère, vers des jours plus cléments. Nos jardins s’éveillent. Nos chaises longues accueillent à nouveau des hôtes. Nous voilà sur le chemin d’un cycle nouveau. Pour fêter cela, le Magazine est allé à la rencontre d’un jardinier affable, spontané et naturel : Simon Hirtz. Une personnalité entière, nourrie par la passion des arbres, des plantes, du « micro » comme du « macro »… de la nature, tout simplement. Il nous parle de son métier, de ce qui l’anime, et il en parle bien. Avis aux amateurs, quelques petits conseils pour prendre soin de votre jardin. C’est précieux, un jardin.

Crédit : Annie Spratt

Avec l’arrivée du printemps, on trouvait l’idée intéressante de pouvoir échanger avec un jardinier. Plus précisément, vous êtes jardinier et paysagiste. Quelle est la différence entre les deux ?

Simon Hirtz, Jardinier et Paysagiste : Oui c’est vrai que j’ai les deux casquettes, je conçois le jardin et après je le retranscris en le faisant moi-même, puis je l’entretiens à la demande du client. Pour faire simple, le jardinier va s’occuper des plantes. C’est-à-dire qu’il va réaliser les tailles à faire au sein du jardin. Il va faire les apports organiques qu’il y a à faire selon les périodes, autrement dit il va entretenir les jardins. Et le paysagiste, lui, -parfois en accord avec un architecte-paysagiste-, va créer et concevoir des jardins. 

Vous préférez votre casquette de jardinier ou de paysagiste ?

Simon Hirtz : Objectivement, c’est différent mais j’aime autant concevoir des jardins que faire de l’entretien. En huit ans d’activité, je n’ai eu que deux fois carte blanche. Je commence tout juste un chantier dans le bordelais où on me donne le champ libre. Je vais pouvoir m’éclater. Je fais ce que je veux. Je mets mes plantes, j’en rajoute sans le dire aux gens, je mets des bulbes qu’ils vont découvrir au printemps prochain, c’est ma signature !

Crédit : Simon Hirtz

Vous avez toujours su que vous travailleriez au contact de la nature ? Était-ce une évidence pour vous ?

S.H : Je suis quelqu’un d’assez atypique, qui n’a pas un parcours professionnel comme les autres ! (rires) J’ai fait des études forestières et de fil en aiguille à la fin de mes études je suis parti voyager pendant quelques années. Quand je suis rentré en France je ne savais pas trop quoi faire de mes 10 doigts donc je me suis tourné vers le vin. J’ai toujours eu cette attirance pour l’extérieur. J’ai toujours été attiré par les plantes. C’est comme ça qu’il y a 8 ans, j’ai décidé de lancer ma boîte en tant que jardinier et paysagiste à Bordeaux. Maintenant je travaille à mon compte, et ça fonctionne très bien. Je fais 70% d’entretien de jardin, et 30% de création de jardin.

Est-ce que vos clients vous demandent des types de jardins ou des plantes en particuliers ? 

S.H : Généralement, les clients veulent le même jardin que celui de leurs voisins, mais en mieux ! Ce qui est le plus difficile, c’est d’expliquer que toutes les plantes ne conviennent pas à tous les sols. Par exemple les sols de Saint-Emilion, ne sont pas les mêmes que ceux de Bordeaux ou ceux du bassin d’Arcachon. Certaines plantes se plairont donc sur certains sols et d’autres moins. J’essaie donc de les sensibiliser au fait que les plantes ne poussent pas de la même manière partout, et surtout qu’il faut laisser le temps au temps. 

Qu’entendez-vous par « laisser le temps au temps » ? 

S.H : Souvent les gens me demandent si telle ou telle plante est morte, ce à quoi je leur réponds que, bien souvent, la plante refleurira au printemps. Aujourd’hui les gens ne sont plus patients, ils n’ont plus aucune idée du temps et des saisons. Ils pensent que tout est toujours vert et que rien ne meure. Comme s’il n’avaient plus la notion de la nature et du temps, c’est étrange. Mais apporter des conseils à mes clients fait aussi parti de mon métier. Je leur explique qu’une plante est comme un être humain, qu’il faut laisser le temps au temps. Par exemple quand on met des plantes volumineuses ou de très gros arbres, la reprise est toujours plus difficile que si on mettait de petites plantes, et ça il faut le savoir.

Avant
Après

Finalement vous tentez de les sensibiliser au cycle de la nature, peut-être même à l’écologie ?

S.H : Oui tout à fait. D’un point de vue écologique, j’ai fait le choix de ne travailler qu’avec des fournisseurs qui sont labellisés. C’est-à-dire que les plants que j’achète sont produits localement, qu’aucun produit phytosanitaire n’est utilisé dans leur développement et qu’ils sont arrosés avec des eaux de pluies recyclées. Également, quand je fais les jardins, je propose la mise en place de système de récupérateurs d’eau, et j’essaie de privilégier des plantes peu gourmandes en eau. 

Au 1er juillet 2022, la loi Labbé va interdire l’utilisation de désherbant sur les lieux de vies et les lieux non-agricoles. Ça va avoir un impact sur nos métiers et il va falloir que nous trouvions des alternatives. On essaye de communiquer, d’amener les gens sur un chemin différent pour leur faire prendre conscience qu’il y a des alternatives qui existe, et des astuces à mettre en place. 

Quel est votre jardin préféré ? Vous êtes plutôt jardin à la française, jardin anglais, jardin zen…

S.H : Je suis très jardin anglais. C’est un « bordel organisé » ! Le secret c’est une forte densité de plantes au mètre carré. Cette densité impose aux fleurs et aux plantes de s’adapter à la place qu’elles ont pour pouvoir fleurir. Des palettes de couleurs vont s’offrir à nous à partir de ce mélange et c’est ce qui fait, je trouve, la magie de ces jardins. Le jardin anglais est très fleuri, bucolique et ce « bazar » en apparence c’est un peu une signature qui se crée « au feeling ». Le jardin anglais fait parti de ces jardins abordables aux gens qui n’ont pas forcément la main verte. Ils se demandent si mettre cette plante ici est une bonne idée, puis n’ayant pas la réponse ils la plantent, observent et apprennent. Il y a quand même quelques règles à respecter, bien sûr, mais dans l’idée tu plantes et tu vois comment la magie opère.

Comment crée-t-on un jardin ?

S.H : J’imagine que c’est mon jardin et je me demande comment je l’aimerais. Côté inspiration, J’ai beaucoup de magazines spécialisés, je surfe aussi sur internet, je consulte des ouvrages d’autres paysagistes… À ce propos, je travaille avec une architecte paysagiste qui m’assiste sur certains chantiers. Après, sur le terrain, je prends des photos et je laisse parler mon imagination. Je délimite les massifs, et je me dis, en fonction de l’orientation, « qu’est-ce que je verrais comme plantes ». À ce moment là l’envie grandit, elle naît en moi, alors j’essaie de ne pas être trop gourmand. Il faut savoir qu’un de nos gros problèmes c’est que les architectes-paysagistes mettent souvent trois fois trop de plantes pour satisfaire leurs clients. Cela crée de la concurrence entre les plantes et beaucoup d’entre elles meurent. Une fois que j’ai le projet bien en tête, je le présente à mes clients et on discute, on ajuste… C’est comme ça que les projets naissent. 

Crédit : Simon Hirtz

Quelles sont les arbres, fleurs ou plantes aromatiques que vous aimez le plus travailler ?

S.H. : Je travaille beaucoup avec le thym rampant, ça fait des petites fleurs mauves ou roses qui sont assez jolies. Ça fonctionne bien dans les massifs parce que ça a ce pouvoir de ramper au sol. Je mets pas mal de romarin aussi, ça apporte de la couleur au début du printemps, et puis les gens s’en servent pour la cuisine. Et sinon je mets beaucoup de fruitiers. J’aime beaucoup les pommiers et les poiriers palmettes, ils poussent en forme de U, visuellement ça fonctionne très bien. Il y a aussi les pommiers colonnaires, qui atteignent 2,5m à maturité et qui poussent en colonne, donc c’est pratique pour ramasser ses poires, ses cerises, ses prunes, ce ne sont pas des choses qu’on trouve beaucoup dans les jardins. Et puis il y a également les fruitiers nains qui commencent à entrer dans nos jardin : les cassisiers, les framboisiers, mais aussi les pêchers, les pruniers, les cerisiers, les poiriers…

Est-ce qu’il y a un projet qui vous a particulièrement marqué ? Un jardin dont vous êtes fier ? 

S.H : Oui, mon jardin ! (rires) J’en suis très fier, c’est un peu là où j’ai lancé mon projet. J’ai fait des vidéos qui ont été vues des milliers de fois et, avec le bouche-à-oreille, les gens ont commencé à m’appeler en me disant que ce qu’ils avaient vu leur plaisait. Ça m’a marqué. En réalité, je prends plaisir à chaque jardin que je fais, il n’y a pas un jour où je me lève et où je me dis : « j’ai pas envie d’aller travailler« . 

Avec l’arrivée du printemps, le retour des beaux jours, quels types de plantes aromatiques pouvons-nous commencer à planter ? 

S.H : Pour les plantes aromatiques c’est trop tôt. À part le thym et le romarin, qui sont les deux seules plantes que vous pouvez planter maintenant, aucune ne s’épanouira avec les températures actuelles. Elles risquent même de geler. Vous pourrez commencer à planter de la ciboulette, du persil, de la coriandre et autre, à partir de mai seulement. Il faut que la terre soit au minimum à 12°C pour que ça pousse, les sols sont trop froids pour le moment. Il faut être patient !

Alors que peut-on déjà planter pour avoir un beau jardin d’ici un ou deux mois ? 

S.H : Mis à part les aromates, tout ce que vous voulez ! Mais un conseil, il ne faut pas planter sur un sol gelé. La meilleure période de plantation, c’est de novembre à mars. Pendant cette période, nous sommes dans un contexte où il fait relativement froid et surtout où il pleut beaucoup. Donc les plantes profitent de toute cette pluie de l’hiver pour l’emmagasiner dans les racines. Celles-ci pourront se propager plus rapidement qu’en période où les sols sont chauds. Après, plus particulièrement, nous sommes dans la période des rosiers, des hortensias, des pivoines, des azalées, des rhododendrons, des camélias… le choix est très large. 

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Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs pour la plantation et l’entretien de leurs plantes ?

S.H : Peu de gens le savent, mais il faut « griffer » la motte quand vous faites vos plantations. Autrement dit, prenez une fourchette ou un sécateur et entaillez votre motte pour casser les racines. La production de radicelles sera favorisée et votre plante s’installera mieux dans le sol. Ensuite, quand vous plantez, faites un trou légèrement plus grand que votre motte, mélangez la terre existante et l’apport de terreau que vous faites, et tassez le tout. Ensuite vous arrosez une à deux fois par semaine, et votre plante sera très belle. 

Et s’ils devaient ne retenir qu’un conseil, quel serait-il ? 

S.H : Que l’erreur est humaine, et que ce n’est pas parce qu’ils taillent mal leurs plantes qu’elles ne vont pas refleurir. Au départ les gens ne savaient pas tailler la vigne, c’est un âne qui a mangé des branches et les Romains se sont aperçu que l’âne, en mangeant de la vigne, raccourcissait les branches, ce qui faisait que la production était d’autant plus importante. Donc si tu te plantes, ce n’est pas grave, tu apprendras de tes erreurs !

Simon Hirtz jardinier paysagiste avec une tondeuse
Crédit : Simon Hirtz

Si vous étiez un arbre ou une plante, lequel ou laquelle seriez-vous ? 

S.H : Si j’étais un arbre je serais un chêne, parce que c’est centenaire alors je verrais beaucoup de choses magnifiques autour de moi. Et si j’étais une fleur, je serais soit une pivoine, très éphémère, soit un dahlia, parce que ça dure dans le temps. Mais je partirai plus sur la pivoine quand même !

Et si De la Cour au Jardin était une plante, laquelle serait-elle ? 

S.H : Je mettrais du Diosma Hirsuta Pink Fontaine, qu’on appelle aussi l’herbe du pêcheur. C’est vraiment la plante que je mets partout en ce moment, avec les dahlias. À ce propos, petit conseil pour vos dahlias, à chaque fois qu’une fleur fane, coupez-la pour favoriser la production de nouvelles fleurs. Évitez aussi de la laisser en pleine terre l’hiver, au risque que le bulbe gèle. Pour ça, une fois fanée, taillez la plante au ras, sortez le bulbe avec une pelle-bêche et laissez-le dans une pièce fraîche et sombre, replantez-le en pleine terre au printemps et vos dahlias seront magnifiques. 

Interview : Alexandre Molitor | Retranscription : Elorane Le Lez


Simon Hirtz

Jardinier-Paysagiste en Nouvelle-Aquitaine

Site internet : simonhirtz-jardinier.fr

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Le Magazine De La Cour Au Jardin

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